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Améliorer l’autoconsommation photovoltaïque grâce aux nudges : résultats d’étude

L’autoconsommation photovoltaïque progresse énormément en France. Au 30 juin 2023, le pays comptait 325 939 autoconsommateurs, soit une progression de 77 % en un an. Cependant, beaucoup de Français sont habitués à consommer en fonction des heures pleines ou creuses, et non pas du niveau d’ensoleillement. Mais améliorer ce taux est possible, notamment avec l’envoi de recommandations personnalisées ou « nudges », qui incitent de manière peu intrusive à modifier son comportement.

 

En s’appuyant sur la recherche existante et grâce à des simulations numériques, les chercheurs d’Enogrid ont développé des nudges permettant de faire des recommandations à la consommation. Ces outils prennent en compte les comportements de consommation et le risque de lassitude lorsque trop de mails sont envoyés. Pour assurer leur fiabilité, ils ont été testés dans un environnement simulé. Et grâce au large réseau de partenaires d’Enogrid, ils seront bientôt déployés dans des opérations d’autoconsommation collective. À la suite de cette étude, nous pensons que les nudges sont efficaces pour améliorer l’autoconsommation photovoltaïque, et nous espérons les adapter à l’autoconsommation collective rapidement.

 

L’étude, publiée sur le journal MDPI Energies, est accessible en anglais sur ce lien.

 

Les nudges, des outils de recommandation à la consommation

Bien qu’il soit possible pour les ménages d’aligner leur consommation sur la production photovoltaïque, cela représente un travail supplémentaire et chronophage. Ainsi, des études ont montré que les ménages retraités réduisent mieux leur consommation que les ménages actifs lorsqu’ils reçoivent un suivi de leur fournisseur d’énergie, probablement parce qu’ils disposent de plus de temps pour s’y consacrer. Les nudges (recommandations à la consommation) permettent de libérer les ménages de cette charge mentale. Et ce, grâce à des conseils précis, par exemple : « Consommez le mercredi après-midi, mais pas le vendredi soir ».

 

Les experts d’Enogrid ont constaté qu’il existe une demande croissante des particuliers pour ce type de service. Les chercheurs ont donc concentré leurs travaux en priorité sur ce groupe. Il convient aussi d’évoquer que l’alternative aux nudges est l’IoT (l’Internet des Objets, c’est à dire la collecte des données de consommation via des capteurs et dispositifs connectés). Les chercheurs ont choisi d’étudier les nudges car cet outil est plus inclusif (il ne requiert pas d’investissement financier conséquent), plus écologique (pas de matériel supplémentaire) et plus durable (il permet un changement des comportements sur le long terme). 

 

Pour cette étude, les chercheurs d’Enogrid ont développé un système automatisé de traitement de données et d’emailing. À partir d’informations sur le profil des consommateurs et la météo, les algorithmes qu’ils ont développés produisent des conseils (envoyés par emails), suggérant aux ménages quand utiliser leurs appareils électriques. Automatiser la conception et l’envoi de nudges permet de générer simultanément des recommandations pour plusieurs centaines de ménages. Cela représente donc un gain de temps considérable par rapport à un traitement manuel des données.

Schéma résumant le fonctionnement du système automatisé de traitement de données et d’emailing pour améliorer l'autoconsommation photovoltaïque.
Schéma résumant le fonctionnement du système automatisé de traitement de données et d’emailing.

Enjeux techniques et méthodologie de l’étude

Pour étudier l’efficacité des nudges (ici, un envoi d’emails hebdomadaire), les chercheurs ont créé un environnement simulé. En effet, la simulation permet d’aller plus vite dans l’analyse et dans la production de résultats, en amont d’un déploiement sur le terrain. La simulation a été créée à partir de données de consommation d’énergie (provenant des ensembles Iris et AMPds), en se concentrant sur les appareils électriques dont l’utilisation pouvait être repoussée (machine à laver, chauffe-eau, etc.). Cette simulation étudie les comportements de deux ménages (un en télétravail et un effectuant quotidiennement des déplacements domicile/lieu de travail ). Elle prend aussi en considération la production d’énergie solaire selon l’heure de la journée, le mois et la couverture nuageuse.

 

Les algorithmes développés par les chercheurs d’Enogrid dépendent de manière cruciale de la bonne qualité des prévisions météo. Ainsi, il est bien d’utiliser des modèles d’ensemble, qui produisent parmi les meilleures estimations possibles aujourd’hui. En effet, chaque épisode où une personne a modifié ses comportements dans l’attente d’une journée ensoleillée mais finalement pluvieuse augmente le risque que les nudges ne soient plus efficaces car considérés peu fiables.

De plus, ces algorithmes identifient des « périodes vertes » où il serait optimal de consommer. Afin de ne pas surcharger d’information les ménages, chaque nudge (envoi d’emails) contient entre 3 et 4 périodes vertes. Ceci assure un ratio optimal entre l’efficacité du nudge et l’attention que peut y consacrer le ménage.

Amélioration du taux d'autoconsommation photovoltaïque en fonction du nombre de périodes vertes par nudge.
Amélioration du taux d'autoconsommation photovoltaïque en fonction du nombre de périodes vertes par nudge.

Des recommandations personnalisées afin d’optimiser l’efficacité des nudges

Dans le développement de ces outils, il fut aussi essentiel de prendre en compte les profils des ménages. En effet, les individus recevant les nudges (emails) doivent avoir une volonté d’améliorer leur autoconsommation et de changer leurs habitudes. De plus, les ménages se lasseront si on leur envoie trop d’informations, et ils n’accepteront de repousser leur consommation d’énergie que pour une certaine durée (généralement 3 jours maximum). On note également plus de flexibilité sur l’horaire des lessives et de l’utilisation du chauffe-eau que pour la cuisson.

 

Pour élaborer les recommandations, l’idéal serait de savoir à l’avance quelle part de leur consommation les ménages sont prêts à modifier. Mais il est pratiquement impossible d’obtenir cette information, notamment car la plupart des individus ne le savent pas eux-mêmes. Afin de répondre à cette incertitude, les chercheurs ont créé pour chaque ménage un profil de consommation hebdomadaire, en analysant les données passées.

 

En résumé, cette étude simulée évalue l’efficacité des nudges pour optimiser la consommation d’énergie en tenant compte des différents profils de ménages, de leurs habitudes de consommation, de leurs appareils électriques et de la météo. Afin de ne pas les décourager, il est essentiel de respecter certains points d’attention :

  • Donner des conseils personnalisés pour chaque ménage (selon leurs habitudes de consommation et équipements)
  • Envoyer des recommandations à la consommation pour 3 à 4 moments de la semaine
  • Utiliser un modèle d’ensemble pour assurer la fiabilité de la météo

Applications pratiques et perspectives pour l’autoconsommation collective

Déployer l’autoconsommation photovoltaïque en France nécessite un véritable changement culturel. En effet, les Français n’ont pas l’habitude de regarder la météo avant d’utiliser leur machine à laver. Il faudra donc un temps d’apprentissage. De plus, l’expérience des ménages est (au moins au début) dégradée lorsque l’on abandonne les sources d’énergie standard et que l’on utilise l’énergie solaire. De fait, il est plus pratique de consommer quand bon nous semble que de prendre en compte cette nouvelle contrainte qui consiste à faire attention au soleil.

 

Les avantages d’ordre économique et environnemental de l’autoconsommation photovoltaïque ne sont pas immédiatement visibles, contrairement à l’inconvénient de devoir tenir compte de la couverture nuageuse. L’adoption généralisée de l’énergie solaire nécessitera donc des efforts pour rendre ces avantages aussi visibles que possible. Nous pensons que le déploiement des nudges, fournissant juste assez d’informations pour aider les utilisateurs à tirer profit de l’énergie solaire, d’une manière aussi peu intrusive que possible, jouera un rôle important dans la réalisation de cet objectif.

 

Dans leur travail, les chercheurs ont étudié l’amélioration de l’autoconsommation dans des bâtiments individuels. Or, depuis quelques années, la législation permet aux propriétaires de bâtiments équipés de panneaux solaires de partager leur production avec leurs voisins : c’est l’autoconsommation collective. La conception de nudges efficaces est alors plus complexe. Les chercheurs d’Enogrid ont l’intention de poursuivre leurs recherches dans ce cadre, afin d’aider ces personnes à tirer le meilleur parti de leurs installations solaires.

 

L’objectif est aujourd’hui d’appliquer ces outils au monde réel. Les nudges sont efficaces pour améliorer l’autoconsommation, et les critères pour assurer leur performance ont été identifiés. À l’heure où nous publions cet article, les phases de test vont bientôt démarrer, et ce grâce à la collaboration de nombreuses opérations partenaires d’Enogrid, partageant un souhait commun d’accélérer la transition énergétique.

Enogrid est une entreprise qui a pour mission de développer l’autoconsommation collective en France. Pour cela, nous développons depuis 2018 des logiciels afin d’outiller les porteurs de projet et diffusons de la connaissance sur ce nouveau modèle de partage de l’électricité à l’échelle locale. La recherche et le développement de nouvelles solutions, avant tout digitales, est donc au cœur de notre métier. Si vous souhaitez en savoir plus sur notre activité, cliquez sur le lien ci-dessous.